50 € : tu me fais une pipe ? 

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La première découverte de cet objet, fait de bois et de roseau remonte à une époque lointaine, aux alentours de 500 ans avant Jésus-Christ, même si nous ignorons toujours à l’heure actuelle la date réelle de son apparition. Initialement utilisée pour fumer divers types d’herbes provoquant des effets euphorisants, hilarants, relaxants (selon les dires de nos ancêtres), le tabac prit le relais par la suite, afin de procurer du plaisir en tout genre à ses utilisateurs. 

Si vous ne l’aviez pas deviné, je visais bien entendu la pipe, drôle de sujet pour une carte blanche de l’Open Barreau, me direz-vous…D’autant plus que je ne parlerai finalement pas de ce type de pipe, faite de bois et de roseau, mais bien de celle décrivant un acte sexuel. Cependant, n’écrivant pas pour la rubrique Sexo du magazine Flair, je ne m’étendrai pas techniquement sur le sujet.  

Au départ, cette carte blanche était spécifiquement adressée à un très cher et non estimé confrère, qui se reconnaitra peut-être à travers ces quelques lignes. Finalement, elle sera dédiée à toutes et à tous.   

Nous sommes le vendredi 19 novembre 2021, jour de la rentrée solennelle pour le Barreau de Liège-Huy, en cité plus qu’ardente…  

A l’heure où la parole se libère, la voix des femmes s’élève et se soulève, le colloque organisé ce matin-là était intitulé : « Où sont les femmes ? La place des femmes dans la société et dans le monde judiciaire ». Au vu de la période actuelle et des dénonciations en cascade concernant les agressions dont les femmes sont victimes, il parait essentiel d’aborder la question de la place de la femme dans le monde professionnel, entre autres, et ce, sans tomber dans un féminisme extrême et sans mettre toute la gente masculine dans le même panier, loin de là.  

Malheureusement, au moins un homme, ce cher et non estimé confrère, n’était pas présent à ce colloque. Peut-être son absence était-elle inspirée par les paroles de Vianney « Mais t’es pas là, mais t’es où ? (Pas là, pas là, pas là) » ? 

Il est 19h, le 19 novembre 2021, et notre incontournable rentrée solennelle tant attendue a bien lieu, dont la tenue fut pourtant redoutée au vu du Xème Codeco qui se tenait exceptionnellement, deux jours plus tôt.  

L’obligation des autotests, synonyme de dépenses supplémentaires, augmentait encore un peu plus l’importance de notre vente de champagne… Commençant donc la vente, et ce accompagnée d’une chère amie du Jeune barreau, c’est à ce moment que ce confrère a trouvé bon de m’interpeler pour me partager une charmante idée : un ticket de champagne d’une valeur de 50,00 € en échange d’une pipe (rappelons-le, nous ne parlons plus de cet objet fait de bois et de roseau). 

Sans doute dans son esprit, aurais-je dû me sentir honorée qu’il me trouve suffisamment à son goût pour me proposer un tel montant ?  

Et pourtant, non, me proposer une pipe en échange de 50,00 € ne me flatte pas et ne me fait pas rire. A cette proposition, quelle aurait dû être ma réaction ? Aurais-je dû simplement répondre aimablement, que je ne fumais pas, lui qui semblait prendre ce sujet avec beaucoup d’humour ?   

Comment cela se fait-il qu’en 2022, lorsque l’on me propose d’écrire une carte blanche, mon sujet soit ce récent évènement, après cinq ans de campagne #MeToo ? Comment se fait-il que certains individus ne comprennent toujours pas que cette remarque est désobligeante, complètement inappropriée et surtout humiliante ? Sincèrement, cette question demeure toujours sans réponse…  

Face à ce type d’attitude, se pose également la question du spectateur, de l’ami, du voisin, du confrère qui, bien que désolé, ne réagit pas. Se positionner, réagir, et s’indigner face à ce type de comportement qui dépasse les limites que l’on s’impose, permettrait surtout de remettre sur un piédestal la notion de respect, qui dépasse la question du genre et du sexe souvent mal interprétée. 

Rappelons-le, le colloque qui se tenait ce 19 novembre 2021, avait pour sujet la place de la femme dans la société, et notamment dans notre milieu, le milieu judiciaire. A une époque où nous devons nous battre pour être l’égal de nos confrères, à une époque où nous sommes trop souvent prises de haut à l’image d’un « Chère Mademoiselle », comment un avocat, à l’instinct primitif certes exacerbé, peut-il encore se permettre de se comporter de la sorte envers l’une de ses consœurs ? Et plus simplement, comment ne pas être fatiguée de ce type de comportement qui n’a pas sa place, et qui ne l’a jamais eue ?

Astrid LECLERE

👏❤️

Récit sidérant. Je suis de ceux qui ignoraient jusqu'où mêmes des confrères peuvent aller. Pas fier de cette ignorance.
Chapeau d'avoir informé au risque de s'exposer.
C'est grâce à de tel geste qu'un changement se fera !
Merci

Libérons le barreau de Liège-Huy des comportements sexistes !
Stop à la banalisation des propos et agissements attentatoires à la dignité des femmes !
Pascal BERTRAND, bâtonnier de l'Ordre.

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