Avocat « pro deo » : je t’aime, moi non plus …

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S’il est une tare que l’on peut reprocher à l’art cinématographique et télévisuel, c’est bien la représentation de l’avocat bien souvent appelé « commis d’office » ou « pro deo ». 

Ainsi, bon nombre de personnages, souvent inculpés ou prévenus (c’est plus vendeur), mentionneront que s’ils sont toujours au cachot, c’est bien parce qu’on leur a commis d’office un incapable du barreau. 

Cette triste réalité vient également à transparaitre dans notre quotidien et notamment sur les réseaux sociaux, là où certains filtres disparaissent pour laisser place à tous discours, réfléchis ou non. 

On y lira : « Mon avocat pro deo n’a rien fait », « Je suis sans nouvelles de l’avocat qui m’a été désigné », « Je ne souhaite plus d’avocat pro deo, je veux quelqu’un de compétent qui fasse réellement avancer mon dossier », et bien d’autres encore. 

Certains le soutiendront même lors d’entrevues avec leur nouveau conseil, traduisant ainsi cette vision tronquée qui induit dans l’esprit du justiciable que pour être bien défendu, il faut nécessairement payer, et payer cher. 

Pourtant, l’accessibilité à la justice est notamment assurée par l’aide juridique, qui constitue un rempart absolument essentiel dans notre système judiciaire. 

Alors pourquoi l’avocat prestant dans le cadre de l’aide juridique de deuxième ligne est-il si mal aimé ? 

A entendre et lire certains témoignages de justiciables, un élément de réponse semble pointer l’évidence : et si le quiproquo venait plutôt de la communication entre l’avocat et son client ? 

Et si la barrière qui existe entre le conseil et son mandant n’était en réalité qu’une chimère basée sur l’incompréhension du domaine juridique et du monde judiciaire ? 

Regrettable incompréhension qui mène les justiciables à remettre en cause les compétences de leur conseil, voire de la justice. 

Ainsi, pour une personne étrangère à la procédure judiciaire et à qui notre jargon échappe totalement, l’absence d’informations inférera une vision nébuleuse d’une justice dont l’impéritie sera pointée du doigt. 

Le justiciable, lorsqu’il passe la porte d’un cabinet d’avocat, s’attend à obtenir des réponses, et non pas à repartir avec quantité d’interrogations. Il n’est à cet égard pas rare de constater qu’alors même que le travail est bien fait, cela ne suffit pas. 

En effet, faut-il encore que le client sache et comprenne que son dossier a été diligemment traité et, au besoin, jugé. 

L’avocat, qu’il preste dans le cadre de l’aide juridique ou non, se doit d’assurer une communication efficace, vecteur essentiel d’une bonne relation avec son client, celle-ci n’étant bien entendu pas fonction du caractère payant de son dossier. 

Cela étant, force est de constater qu’il sera plus aisé pour le justiciable de dénoncer de manière bien souvent infondée l’incompétence de son conseil, et de scander ainsi sur la place publique que ce n’est sans doute que la résultante pour celui-ci de n’être que pro deo. 

En conclusion, si cette vision pour le moins erronée de l’avocat « pro deo » a encore de beaux jours devant elle, il n’en demeure pas moins que ces avocats ne doivent pas se départir de leur volontarisme et se rappeler de cet adage : « justice must not only be done ; it must also be seen to be done ». 

 

Alexandra PREUD’HOMME

 

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