Chronique d’une chronique : réponse à André Tihon

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Comme toujours, la chronique d’André TIHON sur la rentrée littéraire 2018 nous a fait passer un bon moment (je ne me « nounoie » pas, je vous associe à mon plaisir sans douter que vous l’avez partagé).

Il sait donner envie de lire un livre ou de l’éviter et quand il parle du style ou du langage, c’est en connaisseur.

Lorsqu’il souligne qu’on reconnaît immédiatement une page d’Amélie NOTHOMB, ce qui n’est pas donné à tous les écrivains, même si cet auteur (il n'existe pas de forme féminine de ce mot, sauf à l’administration de la Communauté française - Fédération Wall… oh et puis merde à ces titres à rallonge dont se pavoisent des gratte-papier ! : on emploie auteur indifféremment pour qualifier un homme ou une femme) ne figure pas à son panthéon personnel (puisqu’il évoque ses thuriféraires avec un brin d’ironie), on sent qu’il ne dédaignerait pas de partager avec elle au moins cette qualité et je le lui confirme ici : on reconnaît vite la patte d’André.

Il aime glisser entre les lignes quelques coquetteries personnelles.

Je prends pour telle son expression « le quatrième de couverture », qu’il masculinise sans doute par référence au plat verso de l’habit d’un livre mais que le vulgum pecus nomme habituellement « la quatrième de couverture ».

C’est aussi de sa grande érudition qu’il extrait cette expression : « décédée comme suite à un accident de la route ». Qui d’autre que lui dirait une chose pareille ?

Ce comme suite a pourtant une acception quelque peu juridique, « en application de », même s’il faut concéder que le mot suite est mis à toutes les sauces et qu’en conséquence, « comme suite à » peut être entendu comme suite à (je souligne ici qu’inspiré par le susdit André, j’ai volontairement utilisé une tournure qui peut imposer une relecture …).

Sa sûreté de choix du mot juste permet aussi de nous rappeler que « repartie » ne prend pas d’accent et que contrairement à l’usage pourtant courant (je n’ai pas peur d’un léger pléonasme), la première syllabe de ce mot devrait se prononcer comme dans redondance et non comme dans répétition.

En le prononçant correctement, on a un peu l’impression de venir de Sainte-Walburge, où les autochtones parlent volontiers d’un match de « tenisse ».

Toujours au rang des formules un peu érudites, on trouve « l’auteur doute s’ils ne seraient … » ou encore « son domaine s’étrécit » : André raffole des formulations peu usitées, surtout si elles peuvent paraître inexactes au commun des mortels que nous sommes.

Je dois cependant admettre que je ne partage pas son goût pour l’utilisation, très en vogue, du mot « évoquer ».

Les médias nous assomment de « Qu’est-ce que ça vous évoque ? » et même si la tournure n’est pas complètement fausse, elle me hérisse presque autant que lorsqu’ils disent (je l’ai entendu récemment sur Vivacité) « Qu’est-ce que ça vous suscite ? ».

Allant crescendo dans la chronique Tihonienne, j’ai quasiment ressenti une pointe d’agacement lorsqu’André nous apprit que Charles CROS avait fait une découverte en matière de reproduction du son mais n’avait pu, faute de moyens,… « finaliser le procédé » !

« Non. Pas toi ! », me suis-je entendu marmonner.

Pour moi, finaliser, c’est assigner un but à quelque chose et non mener à bien, parachever ou terminer cette chose.

Le verbe vient de la fin qui justifie les moyens, pas de celle qui y met un terme.

Je gage qu’André me trouvera un passage de Claudel qui lui donne ce sens mais je réfute d’avance cette objection : le jour où Claudel s’est fourvoyé de la sorte, il venait sans doute de lire deux pages de Céline (plus que ça, c’est au-delà de mes forces).

L’utilisation actuelle et assez fréquente du terme finaliser en lieu et place de finir m’irrite autant que celle du verbe initier (enseigner à quelqu’un les rudiments d’un art ou d’une science, par exemple) pour commencer ou entamer. Pourquoi penser qu’on a l’air bête quand on utilise le mot juste ?

Ailleurs dans la chronique, ce n’est pas au rang de la coquetterie ou de l’abus de langage mais bien à celui de la coquille pure et simple que j’attribuerai qu’à deux reprises dans un de ses commentaires, il nomme un auteur Guy BOLLET alors que l’intéressé lui-même semble avoir clairement indiqué à son éditeur qu’il s’appelait Guy BOLEY.

André avait peut-être mangé une omelette aux bolets, auxquels il a décidé de mettre deux « l » pour mieux voler (humour phonétique un peu sot que j’aime encore bien… ).

Je veux croire également que c’est une coquille (de la reproduction ?) qui a fait disparaître le pourtant indispensable trait d’union entre les mots chef et d’œuvre, ce mot dont le non-érudit que je suis ignore toujours pourquoi le « f » n’est pas prononcé.

Je m’en voudrais de ne pas évoquer ici le fait que, comme à chaque fois, la chronique d’André m’a convaincu de m’interroger sur le sens de plus d’une chose et notamment, via Sylvain TESSON, sur le fait que la Sirène serait un oiseau.

La majuscule du mot trahit quelque vénération au moins indirecte pour Homère : cette Sirène-là est celle de l’Odyssée, mi-femme, mi-oiseau appartenant aux divinités de la Mort, et non celle du Moyen-Âge puis d’Andersen qui, les seins nus, finit en queue de poisson.

Elles ont, cela dit, toutes deux la faculté d’attirer les marins par leurs chants mélodieux, contrairement à l’insupportable sirène d’ambulance qui vise aussi à attirer notre attention mais qui ne charme vraiment personne.

Bon, je vous laisse ici en comptant bien que vous irez lire et relire la chronique (très) littéraire d’André car je dois d’urgence acquérir le livre de Sylvain TESSON. Et peut-être celui de Guy BOLEY.

Certainement pas celui de l’ANGOT (née SCHWARTZ, ce qui lui va mieux) qui me crispe suffisamment le samedi soir sur France 2, dont un autre critique a dit en substance :

« Propos de pré-ado pubère marqué par la (bonne) cinquantaine ; vocabulaire d’une pauvreté indicible et scénario inexistant : je me suis ennuyé comme jamais ! ».

Ça me suffit pour économiser ses droits d’auteur.

Jari LAMBERT

JARI !

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