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De Liège à Cotonou ou la présence liégeoise à la CIB
La CIB
La Conférence internationale des barreaux de tradition juridique commune (CIB) a pour objet de créer une structure de coopération entre les barreaux francophones. Elle vise à contribuer à l’émergence d’un État de Droit dans chacun des pays membres.
La CIB constitue le plus grand rassemblement d’avocats francophones qui, 3 jours durant, se penchent sur des sujets qui leur sont communs : les droits fondamentaux et la défense.
Le Congrès
Le 30ème Congrès de la CIB s’est déroulé à Cotonou, au Bénin, et avait pour thème central « Alternances politiques et attractivité économique ».
A travers ce sujet d’une brûlante actualité pour certains États africains, les barreaux participants ont exprimé leur volonté de voir la démocratie s’affirmer dans leur pays à travers le principe de l’alternance, facteur de développement économique et de croissance, garantissant un partage équitable des richesses.
De nombreux témoignages de confrères, notamment burkinabés et camerounais, ont pointé du doigt les catastrophes économiques qui ont résulté des dizaines d’années de règne de leur chef d’État s’agrippant au pouvoir sans vergogne.
Dès le 1er jour du Congrès, j’ai pu être témoin de l’émulation et de l’effervescence qui régnaient au Palais des congrès de Cotonou : un rassemblement d’avocats venus de tous horizons pour échanger leurs idées et mieux comprendre les difficultés de notre profession, son rôle dans nos sociétés, et ses enjeux.
Les travaux du Congrès ont convergé vers un sujet d’actualité : le rôle des barreaux dans l’émergence et/ou le maintien d’un État de droit.
Le récent Prix Nobel de la Paix, octroyé au barreau de Tunisie et à la ligue tunisienne des droits de l’homme, a évidemment inspiré les discussions et les débats. Le rôle essentiel du barreau de Tunisie dans la transition démocratique de son pays a été salué par la CIB et constitue un exemple remarquable pour tous les barreaux.
Ainsi, s’exprimant sur le thème de l’ « Alternance politique, principe de gouvernance : implication et responsabilité des barreaux », Maître Imed CHEIKH EL ARBI, conseiller de l’ordre au barreau de Tunisie, nous a narré le rôle actif et déterminant du barreau dans l’accession de son pays à la démocratie.
Le barreau tunisien n’a pas été un acteur politique. Il s’est cantonné à rappeler à l’Assemblée constituante tunisienne, avec transparence et vigueur, les principes fondamentaux d’un État de droit, seuls garants des libertés individuelles et collectives.
Son rôle d’accompagnement au constituant a porté ses fruits : la nouvelle constitution tunisienne consacre des principes essentiels tels que la présomption d’innocence, la liberté d’expression, la liberté de conscience, le droit à un procès équitable, l’abolition des tribunaux d‘exception,…
Le constituant a par ailleurs affirmé – ce qui est inédit – que la profession d’avocat est libre et indépendante, qu’elle participe à l’instauration de la justice et la défense des droits et libertés, mais aussi que l’avocat bénéficie des garanties légales protectrices lui permettant d’assurer ses fonctions (article 105 de la Constitution tunisienne).
Cet article ancre dans la constitution tunisienne la protection et les garanties dont l’avocat doit bénéficier pour assurer avec indépendance et sans pression ni menace son rôle de défenseur.
Cette dernière question a également fait l’objet d’une conférence portant sur le thème de la défense de la défense qui n’a pas manqué de marquer les esprits de tous les participants.
Menaces et pressions initiées par le pouvoir en place, opinion publique dévastatrice, justice corrompue jusqu’à la moelle : tel est le quotidien de certains de nos confrères.
A cet égard, la CIB a rappelé avec tristesse et révolte l’assassinat du Bâtonnier Tahir Elçi, survenu le 25 novembre 2015, frappé d’un tir mortel à la tête alors qu’il venait de prononcer un discours plaidant pour le respect des droits civils et politiques et la liberté d'expression.
Le concours de plaidoiries
En marge du Congrès de la CIB, un concours de plaidoiries est traditionnellement organisé pour les jeunes représentants de plusieurs barreaux membres, dont le barreau de Liège que j’ai eu l’honneur de représenter.
Le concours fut d’abord l’opportunité de rencontrer tous les autres candidats, représentant les barreaux de Guinée, de Montréal, du Mali, de Bruxelles, du Nigeria, du Cameroun, de Port-au-Prince et du Bénin.
Les candidats étaient logés dans le même hôtel, ce qui nous a permis de tisser des liens durant le Congrès mais aussi en dehors de celui-ci, lors de soirées et visites de Cotonou.
Le concours de plaidoiries fut aussi un moment riche en émotions : il s’agit d’une expérience inoubliable et enrichissante qui, à mon sens, forge tout jeune avocat à l’heure de prendre la parole devant une salle comble !
Ce fut aussi, en ce qui me concerne, le temps d’une réflexion poussée sur le thème imposé : « Peut-on condamner équitablement un innocent ? », avec une réponse qui se devait d’être affirmative.
Le concours fut remporté par la brillante candidate canadienne qui s’était adonnée à un exercice de style particulièrement bien exécuté.
Une expérience unique
Mon séjour béninois restera une expérience unique faite de rencontres, de discussions et de la découverte d’une toute autre réalité de notre profession. C’est assurément plus enrichie que je suis rentrée à Liège et je ne puis que conseiller à mes jeunes confrères de vivre cette expérience inoubliable.
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