Partager sur
"Pour faire une prairie, il faut du trèfle et une abeille »
Conduire une ruche. Mettre les mains dans la ruche. Comprendre la vie. La vie de la Terre. Notre vie. S’asseoir au milieu du rucher. Entre deux ruches. Juste à côté. Respirer la ruche. Ecouter le bruissement. Sentir le vrombissement de la vie. Voir le pollen qui rentre en pelotes. Entendre le chant des reines. Cueillir un essaim. Lui offrir une nouvelle ruche. Comprendre l’intelligence collective.
Conduire une ruche, c’est toucher la force et la fragilité de notre vie.
La colonie est intelligente et démocrate.
Le saviez-vous ? Au printemps, la colonie se sépare en deux et la « vieille » reine s’en va, à la recherche d’un nouvel endroit pour fonder une nouvelle colonie. Les abeilles essaiment. Comment trouver l’endroit approprié ? Il doit être idéal, sinon la colonie ne pourra affronter l’hiver. L’essaim est mené par environ 200 à 300 «éclaireuses » qui débattent entre elles.
« Un essaim d’abeille parvient à une forme d’intelligence collective dans le choix de son domicile. Les ouvrières d’un essaim d’abeille à miel conduisent un processus démocratique de prise de décision pour choisir le lieu de leur nouvel habitat – un choix qui aura, l’hiver venu, des implications en termes de vie ou de mort.
Identifier une série d’options distinctes, partager librement les informations concernant ces options et choisir collectivement la meilleure… Partager les découvertes en exécutant des danses, conduire un débat concernant la meilleure option possible et parvenir à un accord à propos du nouveau domicile de l’essaim. Et, presque toujours, la sagesse collective des abeilles choisit la meilleure option parmi toutes celles qui sont disponibles. »[1]
Une anecdote : lors d’une journée de travail et de réflexion à la maison avec mes associés, Me Olivier Evrard et Me Gunther Pahaut, nous sommes interrompus par un essaim. Belle mise en situation. Bel exercice de « confiance en soi » pour mes amis : récolter un essaim ! Hop au boulot !
Le saviez-vous ? : Le dilemme du mâle.
Les abeilles mâles sont appelés « faux-bourdons ». Ils ne butinent pas. Ils n’ont pas de dard, et donc, ne piquent pas. Ils se nourrissent de la ruche. Leur seule fonction est de féconder les jeunes reines vierges. Les accouplements se réalisent au printemps dans des « ères de congrégation», sortes de lupanars géants, situés à plusieurs kilomètres des ruchers où se retrouvent jeunes vierges et faux bourdons en pleine tempête hormonale. Les jeunes reines se font féconder par une douzaine de mâles ce qui assure le brassage génétique et prévient la consanguinité. Elles remplissent leur « spermatèque ». Elles pourront pondre pendant 4 à 5 ans.
Le mâle meurt après l’accouplement car il laisse sa « virilité » dans l’aventure.
Les mâles qui n’ont pas trouvé chaussure à leur pied pendant la belle saison se font chasser de la ruche à l’automne. Ils ne servent plus à rien et ne sont que d’inutiles bouches à nourrir en hiver. Exclus de la ruche manu militari, ils meurent de faim et de froid. On parle du « massacre des mâles ».
Alors, voici le dilemme du mâle : vaut-il mieux vivre longtemps, draguer toute sa vie, se nourrir de miel et de nectar puis mourir puceau banni des siens, ou, connaitre une seule fois l’amour et mourir dans l’extase ?
Le saviez-vous ? : Un monde sans abeilles, c’est moins drôle.
Voici 2 belles conférences TED. Edifiant.
Les abeilles c’est la vie, je vous le dis. Plongez-vous dans la vie. Sans abeilles, pas de vie !
Les abeilles, la vie, la mort,
Conduire une ruche c’est appréhender la mort. Y a-t-il une mort avant la vie ? En été une abeille vit 6 semaines. 6 semaines c’est court. 3 mois en hiver. La reine vit 4 à 5 ans.
Lorsqu’elle émerge de sa cellule, 21 jours après la ponte de l’œuf, l’abeille est un être parfait. Prête à toutes les tâches. Prête à embellir son environnement. Prête à le féconder, à lui donner la vie.
Une vie parfaite en 6 semaines. Impressionnant.
Depuis 80.000 ans. De 6 semaines en 6 semaines. De saisons en saisons. La vie puis la mort et chaque fois, un être parfait. L’abeille est passeuse de vie. Elle a commencé bien avant l’homme.
Les abeilles, Nietzsche et Spinoza
Les abeilles c’est aussi la sagesse. Plongez-vous dans « La sagesse des abeilles. Première leçon de Démocrite » de Michel ONFRAY
«…. Autrement dit savoir que nous sommes fragments de volonté de puissance comme l'abeille. »
Puis vouloir ce savoir que nous sommes morceau de cosmos comme l'abeille. »
Enfin aimer et jouir de vouloir ce savoir que nous sommes parties aveugles d'un grand tout comme l'abeille. »
Les abeilles, c’est Nietzsche et Spinoza dans la ruche.
Voilà pourquoi je suis apiculteur.
Et puis comme dit le poète :
"Pour faire une prairie il faut du trèfle et une abeille,
Un trèfle, et l'abeille,
La rêverie.
Si les abeilles sont rares,
La rêverie suffit."
Emily Dickinson (écrit en 1779 in "Car l'adieu, c'est la nuit")
Préservons nos trèfles, nos abeilles, et nos rêves !
Avocat Apiculteur Amateur Ardent Admiratif (« AAAAA » : comme l’andouillette.)
Voici quelques belles sources d’inspirations :
-« Sur les épaules de Darwin » la remarquable émission de Jean-Claude Ameisen sur France-Inter, podcaster sans modération.
A la découverte du monde des abeilles
-Thomas Seeley, (dans la lignée de Karl Von Frisch, Konrad Lorenz et Niklaas Tinbergen, Prix Nobel en 1973) Vidéo
-Le seul prix Nobel belge de littérature Maurice Maeterlink - La vie des abeilles
-Des photos fantastiques : The honey Gatherers
-Le CARI Centre Apicole de recherche et d’Informations, établi à Louvain-la-Neuve, jouit d’une renommée mondiale CARI
-Et la vie d’un rucher en région liégeoise (le mien) : Tchantches apiculture
Ajouter un commentaire