Le mot du Bâtonnier

Bâtonnier

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Madame et Messieurs les Bâtonniers,

Chers Confrères,

Des réformes majeures se profilent à l’horizon, qui auront une incidence certaine sur l’exercice de notre activité professionnelle, soit parce qu’elles ont pour objet de réformer le paysage judiciaire dans son ensemble, soit parce que peut-être un jour parviendront-elles à réformer et à pérenniser l’aide juridique au profit du justiciable.

La réforme du paysage judiciaire dont la ministre de la justice souhaite que la première partie entre en vigueur le 1er avril 2014 au plus tard, verra naître les grands arrondissements, dont les corollaires seront les tribunaux élargis et les antennes locales de ceux-ci.

Dans cette perspective, la mobilité et la spécialisation des magistrats constituent une des plus-values poursuivie par le projet au sujet duquel bien de l’encre a déjà coulé, tandis que sans doute un certain nombre de recours seront introduits ici ou là devant la Cour Constitutionnelle.

Quoi qu’il advienne de ce double projet (fusion des arrondissements et mobilité des magistrats d’une part, management des juridictions et autonomie financière d’autre part), il ne fait pas l’ombre d’un doute que celui-ci aura des incidences sur l’exercice de notre profession au quotidien.

Il conviendra de veiller à ce qu’à travers ces réformes, ne soient mises en péril ni l’indépendance de la justice qui passe par l’inamovibilité des magistrats, pour ce qui concerne les règles de mobilité, ni le bon fonctionnement de la justice, tant pénale que civile, laquelle passe par l’allocation de moyens suffisants pour assurer le fonctionnement des greffes, des parquets mais aussi le juste financement des enquêtes pénales à l’information comme à l’instruction.

Il s’agit d’enjeux auxquels je ne doute pas que les bâtonniers resteront attentifs, tant au sein de leurs barreaux, qu’au sein de l’assemblée générale de l’OBFG qui sera bientôt présidée par Monsieur le bâtonnier Patrick Henry.

Ces enjeux dont nous parlons aujourd’hui, ne sont pas communautaires, mais concerne des préoccupations qui tiennent aux grands principes démocratiques et à l’intérêt général du vivre ensemble que le droit et la justice ont pour vocation de réguler.

Dans cette mesure, il est essentiel que le dialogue entre l’OBFG et l’OVB soit ouvert et permanent, tout comme le dialogue entre les bâtonniers francophones et les bâtonniers flamands du pays.

Il convient à cet égard de maintenir ou de développer des lieux de dialogue commun, tant il est vrai qu’aussi longtemps que nous pourrons nous parler, et dès lors nous comprendre, nous préserverons l’essentiel dans la perspective du bien-être commun.

 

 

 

 

 

 

 

A cet égard, c’est avec beaucoup d’enthousiasme mais aussi de réelles perspectives d’avenir que Maître Didier Goeminne, bâtonnier de Gand, et moi-même avons décidé de jumeler le barreau de Liège et de Gand, ce qui fut fait lors d’une séance commune tenue à Liège le 7 mai dernier.

Vous trouverez ici le texte de la convention de jumelage qui fut signée entre nos deux barreaux à cette occasion.

Les villes de Gand et de Liège sont à maints égards comparables, toutes deux villes de culture et villes universitaires (sièges d’universités publiques, ce qui n’est pas indifférent), leur population respective, ainsi que la population des deux barreaux, sont comparables, même si nous savons que la ville de Gand est sans doute plus prospère que la ville de Liège aujourd’hui.

Ce qui nous unit par ailleurs, c’est aussi l’ouverture mutuelle que nos deux barreaux entretiennent soigneusement à l’égard de la langue et de la culture de l’autre, ouverture à laquelle tant Monsieur le bâtonnier Didier Goeminne que moi-même sommes particulièrement attachés car elles sont gages d’intelligence et d’humanisme, au contraire de tout mouvement de rejet de l’autre et de repli sur soi dont nous avons appris par le passé à quelles dérives ils peuvent nous mener.

D’autre part, le barreau restera confronté dans les années qui viennent au combat relatif à l’avenir de l’aide juridique, que deux années de lutte n’ont pas permis de solutionner tant le dialogue avec la ministre de la justice est inexistant et tant ce gouvernement repose sur un pacte de non-agression mutuel, au terme duquel chaque ministre est omnipotent – ou peu s’en faut – dans le domaine de compétence qui lui a été dévolu.

Sans doute fallait-il en passer par cette sorte de compromis pour arriver à constituer ce gouvernement que nous avons très longuement attendu de nos vœux, mais il ne fait pas de doute que cette configuration particulière a singulièrement compliqué les revendications légitimes des barreaux même – et surtout – en période de crise économique.

En effet, ce combat est mené dans l’intérêt du justiciable lui-même auquel l’article 23 de la Constitution a conféré au titre de droit fondamental le droit au droit et à la justice, au même titre que le droit à l’enseignement et le droit à la santé doivent être garantis dans tous les États démocratiques membres du Conseil de l’Europe, notamment.

Vous vous souviendrez que nous avions initié un mouvement de grève aux mois de mai et juin 2012, afin de maintenir à 26,91 euros la valeur du point en aide juridique.

Le paiement qui vient d’intervenir pour la période du 1er juillet 2011 au 30 juin 2012 conduit à une valorisation du point à concurrence de 24,26 euros, soit une diminution de 10 %.

Devant l’impossibilité radicale d’obtenir de la ministre de la justice un véritable dialogue sur la réforme de l’aide juridique au sujet de laquelle les Ordres tant francophones que flamands ont formulé des propositions concrètes accompagnées de projets de textes légaux et règlementaires, afin à la fois d’assurer la pérennité de l’aide juridique, son refinancement, mais aussi sa cohérence d’ensemble, il ne fut jamais possible d’aborder les questions de fond avec une ministre dont le seul objectif était budgétaire.

Il n’est du reste pas illégitime de se demander si cette position politique ne préfigure pas d’une future régionalisation de la justice ou à tout le moins du système de l’aide juridique, dont certains souhaiteraient qu’elle survienne  avant le refinancement plutôt qu’après celui-ci.

L’absence totale de dialogue a conduit les bâtonniers de l’assemblée générale de l’OBFG à lancer citation à l’encontre de l’Etat, afin non seulement de maintenir la valeur du point, mais encore même de l’indexer, ce qu’elle n’a pas été depuis les premiers accords de refinancement de l’aide juridique.

De même, l’assemblée générale des bâtonniers de l’OBFG a-t-elle également décidé de manifester ce jeudi 13 juin 2013 à 10 heures, Place Royale à Bruxelles, en compagnie d’un certain nombre d’associations et de mouvements citoyens, une telle action commune ayant aussi pour but d’expliquer à l’opinion publique que notre combat n’est pas corporatiste, mais essentiellement fondé sur l’intérêt général et l’intérêt bien compris du justiciable.

Une délégation des manifestants sera ensuite reçue par le Premier Ministre.

Ce sont là, une fois encore, des combats fondés sur les valeurs de justice et de solidarité, valeurs essentielles que les barreaux ont pour vocation de défendre pied à pied.

Je ne doute pas, une fois encore, que chaque barreau et l’assemblée générale des bâtonniers, resteront à la pointe de ce combat dont l’enjeu est celui d’une justice de qualité accessible à tous.

Ils nous trouveront toujours à leurs côtés.

Permettez-moi enfin de dire un mot des élections de l’Ordre qui se tiendront les 19 et 20 juin prochains.

Vous savez que le bâtonnier et les membres du conseil de l’Ordre travaillent sans relâche au profit de chacun d’entre nous, quelquefois sur des questions essentielles pour l’avenir de notre profession.

Plus vous serez nombreux à exprimer votre opinion à travers le vote que vous émettrez, plus les engagements de vos élus seront légitimes et proches de vos attentes.

Je vous souhaite une excellente fin d’année judiciaire.

Je vous prie de croire, Madame et Messieurs les Bâtonniers, chers Confrères, à l’assurance de mon entier dévouement.

Le Bâtonnier de l’Ordre, Eric LEMMENS.

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