Je voudrais vous dire

Editorial

Qu'il n'est pas évident de prendre la parole pour exprimer une pensée, une idée, un rêve ou une utopie après les événements de Paris. Qu'après les attentats de New-York, Londres, Madrid, Boston, Bruxelles, Paris, ou Copenhague, le monde n'est plus tout à fait le même. Que les indignations sélectives sont cependant difficilement évitables et emportent avec elles, leur lot d'injustice que tant d'oubliés dans le monde subissent quotidiennement. Que je ne sais pas si je suis vraiment "Charlie", moi qui n'avais jamais acheté ce journal satirique que je trouvais souvent vulgaire. Que ce que je trouvais gênant dans cet hebdomadaire étant plus que probablement un manque de second degré dans mon chef voire d'humour, tout simplement. Que parler, encore parler, discuter, argumenter, échanger, s'exprimer est la meilleure arme pour lutter contre l'obscurantisme. Que le radicalisme fait peur mais que les solutions proposées par notre gouvernement pour tenter de l'éradiquer semblent bien inappropriées si elles portent atteintes à nos droits fondamentaux. Qu'on ne lutte pas contre une phénomène aussi diffus et dangereux que le terrorisme en n'apportant qu'une réponse exclusivement répressive. Qu'à l'heure de soutenir la liberté d'expression, je préfère soutenir le journal satirique liégeois "Poiscaille" (20 € par an) que de m'abonner à Charlie Hebdo même si l'un n'exclut pas l'autre. Qu'en discutant avec des étudiants à qui je dois enseigner les droits et libertés fondamentaux de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, je me surprends à bloquer  lorsqu'ils me demandent où se situe l'équilibre à trouver entre liberté d'expression et liberté de religion. Que lorsqu'un enfant de huit ans est interrogé par la police dans le cadre de l'apologie du terrorisme dont il se serait rendu coupable en déclarant: "Je ne suis pas Charlie, je suis avec les terroristes", je me dis que notre système judiciaire et policier n'est pas à la hauteur. Que lorsque j'entends parler de Daesh, mon sang se glace parce que ce qu'ils font n'ont rien avoir avec l'Islam et rien avoir avec un État digne de ce nom (une nation civilisée pour reprendre les termes de la Charte des Nations-Unies). Que la terreur que sème Boko Haram au Nigeria ou au Cameroun ne doit pas nous faire oublier que les principales victimes des conflits sont les femmes et les enfants. Que la mer Méditerranée va bientôt regorger plus de migrants morts en tentant de la traverser que de poissons à pécher. Qu'en fêtant le 70ème anniversaire de la libération des camps de concentration le 27 janvier dernier, les horreurs perpétrées par le régime nazi sont toujours aussi difficiles à regarder. Que l'Union européenne connait cependant une paix historique depuis la fin de la seconde guerre mondiale mais ne peut éviter qu'à ses portes, des guerres naissent et ne se finissent pas malgré des accords ou des cessez-le-feu. Que cette Europe est également incapable de mettre fin à l'exil fiscal dès lors qu'elle ne parvient d'ailleurs pas non plus à harmoniser les règles fiscales entre les États membres. Que mes propos n'engagent que moi et ne pèsent pas bien lourd dans le flot continu des informations dont vous êtes quotidiennement inondés. Alors, qu'ils servent ou non, qu'ils vous heurtent ou non, que vous les approuviez ou non, je vous les livre pour qu'ils soient soumis à votre regard et vos critiques car c'est dans le débat d'idées que le progrès peut naitre. #Agissons Jean-Pierre JACQUES  src=  

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