La surpopulation carcérale ou l’indifférence intolérable

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Sandra-Bebuto1Encouragé par le Barreau de Liège, AVOCATS.be a décidé de lancer une procédure contre l’État belge en raison de la surpopulation carcérale au sein de l’établissement pénitentiaire de Lantin dont la maison d’arrêt doit parfois accueillir des détenus jusqu’à 40% au-delà de ses capacités. En effet, depuis un temps certain, la prison fait parler d’elle en des termes effroyables : l’entassement de plusieurs détenus sur quelques mètres carrés, la mise au cachot en l’absence de place en cellule normale, l’insalubrité, le  manque de personnel, l’insuffisance des soins et de nourriture, le taux de suicide élevé sont autant de constats récurrents au sein des établissements pénitentiaires. L’État adopte la politique de l’autruche, laissant croire qu’en construisant des prisons encore et encore, il va solutionner son problème structurel. Pourtant, de la Cour européenne au Comité pour la prévention de la torture du Conseil de l’Europe, en passant par les associations actives dans le milieu pénitentiaire ou encore la Cour des comptes, le message est clair : il faut gérer autrement l’incarcération. En laissant pourrir la situation, l’État, tant par ses actions que par ses omissions, ne respecte pas ses obligations nationales et internationales. L’indifférence ne peut perdurer. L’article 495 du Code judiciaire dispose notamment qu’AVOCATS.be prend : « les initiatives et les mesures utiles en matière de formation, de règles disciplinaires et de loyauté professionnelle, ainsi que pour la défense des intérêts de l'avocat et du justiciable » (1). Les intérêts du justiciable sont au centre du débat relatif à la surpopulation carcérale puisque, en effet, leurs droits fondamentaux sont compromis. AVOCATS.be est ainsi concerné en première ligne par cette problématique. Il a non seulement le droit mais aussi le devoir d’agir. En termes de réparation, AVOCATS.be met l’État face à ses responsabilités : il est temps par exemple de faire entrer en vigueur l’ensemble des textes adoptés qui garantissent les droits des détenus, de rendre la détention préventive véritablement exceptionnelle, de privilégier les modes alternatifs à l’emprisonnement, de changer en profondeur la politique pénitentiaire. Un État démocratique doit se préoccuper de ses détenus, surtout lorsque près de 40% d’entre eux sont présumés innocents. A l’occasion de l’introduction de cette action en justice, le Barreau de Liège organise ce 11 décembre 2014 une soirée consacrée aux conditions de détention en prison. La soirée débutera par le spectacle poignant de Jean-Marc MAHY  "un homme debout" à la Cité Miroir.

La pièce sera suivie d’un échange d’idées entre le public et un panel d’intervenants bien intéressants tant pour leur qualités intrinsèques que pour leurs expériences : - Monsieur Eric DELCHEVALERIE, directeur à la prison de Namur - Maïté DERUE, substitut du procureur général près la Cour d’appel de Liège et membre belge du Comité pour la prévention de la torture du Conseil de l’Europe (CPT) - Olivia NEDERLANDT, avocate au barreau de Bruxelles et membre de l’Observatoire international des prisons (OIP) - Etienne NOEL, avocat au barreau de Rouen, membre de l’Observatoire international des prisons (OIP) et auteur du livre « Aux côtés des détenus - un avocat contre l’Etat » - Michaël DANTINNE, chargé de cours au service de criminologie de l’Université de Liège Afin d’ouvrir précisément le débat, permettez-nous de citer Marc Nève qui écrivait dans une carte blanche relative à l’ouverture d’une nième prison : « Ouvrir une nouvelle prison s’apparente à un aveu d’échec. Ni plus, ni moins. Et lorsqu’il est question d’inaugurer un nouvel établissement, impossible de ne pas se rappeler les propos de Michel Foucault qui écrivait, avec ses amis fondateurs du Groupe information Prisons, en 1971 : « on nous dit que les prisons sont surpeuplées », « mais si c’était la population qui était suremprisonnée ? » (2) (3) Pour la commission des libertés Sandra Berbuto 1 C’est nous qui soulignons. 2 Manifeste du GIP du 8 février 1971, in Michel Foucault, Dits et écrits, t.2, Paris, Gallimard, 1994, p.1974. 3 « Ouvrir une prison est un aveu d’échec », LLB, 17 juillet 2014

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