Dans la peau de ...

Editorial

  Elle est entre la vie et la mort. Malala Yousufzai, l'adolescente pakistanaise blessée par balles par les talibans en raison de son combat pour l'éducation des filles, a été transférée vers la Grande-Bretagne pour y être soignée. Malala avait été la première récipiendaire du prix national pour la paix créé l'an dernier par le Pakistan après s'être fait connaître à l'âge de 11 ans seulement en dénonçant sur un blog de la BBC les violences commises par les fondamentalistes talibans dans sa région entre 2007 et 2009. L'attaque a été revendiquée par les rebelles du Mouvement des talibans du Pakistan qui ont affirmé avoir pris pour cible Malala pour "son rôle de pionnière" dans la défense de l'éducation des jeunes filles et ses critiques musclées à leur égard. L’énergie déployée aujourd’hui par les autorités pakistanaises à tenter de sauver cette jeune fille est inversement proportionnelle à la protection réelle dont bénéficie la gente féminine dans ce pays. La guerre médiatique est à présent déclarée. Il faut sauver la soldate Yousufzai. Son sourire, sa lutte pour l’émancipation féminine et la balle qui a traversé son cerveau sans lui ôter la vie marqueront à jamais et témoignent de l’ignominie dont la nature humaine est capable lorsque l’obscurantisme prend le dessus. Une autre adolescente de 15 ans n’a pas non plus pu être protégée efficacement contre le harcèlement dont elle a été victime au Canada. Elle disait avoir été conduite par un inconnu, à 12 ans, à montrer sa poitrine devant une webcam. L'inconnu avait diffusé ces images parmi ses amis. Un an plus tard, il les avait publiées sur une page Facebook dédiée, que ses proches et connaissances de collège avaient été invités à rejoindre. Amanda Todd racontait avoir changé plusieurs fois d'école, avoir été chaque fois rattrapée par cet homme, qui diffusait de nouveau les images. Dans son dernier lycée, elle disait s'être rapprochée d'un garçon. L'amourette avait dégénéré quand la petite amie du jeune homme avait découvert son existence. Amanda disait avoir été battue par la rivale et ses amis. Elle avait avalé de l'eau de Javel, atterri à l'hôpital, changé encore d'école et se disait poursuivie par les amis de sa rivale sur Facebook. Elle s'est taillé les veines à plusieurs reprises, a abusé de drogues et est retournée à l'hôpital après une overdose. Elle achevait son récit (accessible en vidéo) en écrivant : "Je n'ai personne. J'ai besoin de quelqu'un. Mon nom est Amanda Todd."  Si je parle d’elle, c’est parce que le témoignage de la maman d'Amanda m’a touché.  Amanda, explique-t-elle "aurait aimé qu'on évoque son histoire pour sauver d'autres filles. L'un de ses objectifs était que son message soit utile". L’utilité du message est bien l’un des défis les plus importants de notre société de l’hyper-communication. A l’occasion du 150ème anniversaire de la High Court de Madras, Prabha Sridevan, ancien magistrat de cette Cour expliquait, dans les colonnes du prestigieux journal indien « The Hindu », le rôle fondamental qu’avait joué cette juridiction dans l’évolution du genre en justice en donnant des impulsions sociales caractérisées à travers ses décisions. Sous le titre évocateur « Standing in a womans’s shoes », il part du constat simple mais universel que la vulnérabilité physique, sociale et économique affecte différemment les hommes et les femmes. Le message relatif aux droits des femmes est souvent incantatoire dès lors qu’il s’exprime sans être entendu. Le nombre de femmes élues récemment démontrent que la parité exigée sur listes n’est pas celle du résultat des urnes. [caption id="attachment_1586" align="alignright" width="274" caption="Mme Nkosazana Dlamini-Zuma"][/caption] Même si il faut ici souligner l’élection de Mme Nkosazana Dlamini-Zuma à la présidence de la Commission de l’Union africaine. Cette Sud-Africaine, ancienne épouse de Jacob Zuma, plusieurs fois ministre dont ministre de la santé sous Mandela, est la première femme à accéder à cette fonction prestigieuse. Elle a promis de mener ses premiers combats pour résoudre le conflit au Mali, la crise sahélienne et les conflits dans la région des grands lacs. L’espoir est donc dans les mains d’une femme africaine. Malala, Amanda, Prabha, Nkosazana, vous nous offrez un autre regard sur notre société. Chacun et chacune « en vos titres et qualités » pour reprendre une pompeuse expression si souvent utilisée.  Et il n’y a pas d’âge pour changer son regard sur les choses.    width= Jean-Pierre JACQUES, rédacteur en chef

Ajouter un commentaire

Texte brut

  • Aucune balise HTML autorisée.
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.
  • Les adresses de pages web et les adresses courriel se transforment en liens automatiquement.
CAPTCHA
This question is for testing whether or not you are a human visitor and to prevent automated spam submissions.